« En raison de la hausse des taux d’intérêt, les remboursements de la dette de l’Afrique atteindront 62 milliards de dollars cette année, soit une augmentation de 35 % par rapport à 2022. Cette remarque du président kenyan William Ruto lors du sommet africain sur le climat à Nairobi a attiré l’attention sur les obstacles flagrants à la capacité des pays à s’adapter au changement climatique en raison des charges financières.
« Si vous ne résolvez pas la question de la dette, vous ne pourrez pas résoudre la question du climat », a poursuivi M. Ruto.
Des préoccupations similaires ont été exprimées lors de la COP28 au cours du dialogue ministériel de haut niveau et par les négociateurs des pays en développement au sein du comité permanent pour le financement, le financement à long terme et les nouveaux objectifs collectifs quantifiés (NCQG).
Dans un récent rapport de l’OCDE, ECO a constaté que les prêts représentaient plus de deux tiers du financement public de la lutte contre le changement climatique en 2021, tandis que les subventions représentaient moins de 30 % (20,1 milliards de dollars). Selon le rapport alternatif d’Oxfam, 31 % du financement climatique a été fourni sous forme de prêts concessionnels et 42 % sous forme de prêts non concessionnels en 2019-2020. Comme un prêt au logement, les prêts climatiques sont destinés à être remboursés avec des taux d’intérêt. Le fait de comptabiliser la valeur nominale totale des prêts dans le financement de la lutte contre le changement climatique gonfle donc considérablement les contributions aux 100 milliards de dollars promis, un précédent que l’OCE juge trompeur.
Les augmentations significatives des taux d’intérêt sur les marchés mondiaux des capitaux impliquent des remboursements plus élevés et de nouvelles augmentations de la dette publique. Après dix ans de taux d’intérêt proches de zéro, les prêts climatiques non concessionnels reflètent l’augmentation soudaine du taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine à 5 % en réponse à une forte inflation. Confrontés à des options limitées, les demandeurs de prêts doivent choisir entre un changement climatique néfaste et des remboursements d’intérêts exorbitants. Actuellement, la Banque mondiale accorde à la BIRD des prêts flexibles d’une durée de 20 ans avec des taux d’intérêt de près de 7 %, ce qui revient à faire suer les emprunteurs pour qu’ils effectuent des remboursements totaux à un niveau supérieur d’environ 40 % aux conditions des dix dernières années !
Prendre des mesures transformatrices en matière de climat tout en gérant les dépenses publiques pour l’éducation, les secteurs sociaux, la santé et bien d’autres choses encore sera encore plus difficile face à l’augmentation des taux d’intérêt. De nouveaux pays viendront certainement s’ajouter aux 38 pays déjà en situation de surendettement ou à haut risque. ECO suggère plutôt de prescrire une « médecine préventive » pour limiter ou même éviter les prêts non concessionnels émis avec des taux d’intérêt accrus sur les marchés des capitaux. Il est certainement injuste que les pauvres et les vulnérables des pays les moins avancés, dont la contribution aux émissions est négligeable, se voient maintenant demander de rembourser l’argent dépensé pour l’adaptation et la résilience avec des taux d’intérêt prédateurs.
ECO se fait l’écho des ministres des pays en développement : nous avons besoin d’une véritable augmentation des ressources publiques sous forme de subventions pour l’adaptation et la résilience. Nous implorons les pays développés de respecter l’accord visant à doubler le financement de l’adaptation. Si le financement de l’adaptation reste insuffisant, l’intégrité du NCQG actuellement négocié compromet la conclusion d’un accord lors de la COP29 de l’année prochaine !