Nous y revoilà. Après un saut à Doha, des entrechats à Bonn, un rebond à nouveau à Bonn, nous revenons en Pologne pour une autre Conférence des Parties (COP). En quelques mois, pas mal de choses se sont produites : le travail du Groupe 1 du GIEC cloue le bec aux climato-sceptiques avec son 5ème rapport ; des actions explicites contre le charbon lancées à la fois par la Chine et les Etats-Unis ; ça bouge aussi du côté du Protocole de Montréal et même des aviateurs de l’OACI. Tout cela est bien revigorant, mais nous restons tout de même inquiets pour la suite.
ECO -et son édition en Français- souhaite la bienvenue à ses lecteurs en Pologne. Que va-il se passer ici ? Quels trucs, quelles cartes magiques vont encore apparaître ? Comment les objections de la Russie et compagnie seront-elles résolues ? Combien de juristes les Etats-Unis vont-ils aligner pour éviter toute mention de la « compensation » ?
En positif, les négociations côté Protocole de Kyoto et processus de Bali sont achevées. Les négociateurs vont être moins envahis par ces diagrammes compliqués, nécessaires pour suivre jusqu’à sept négociations en parallèle. Le programme désormais épuré devra être mis à profit pour se concentrer sur les points vraiment importants et urgents, sur les finances, sur les dommages et les pertes, sur les ambitions pré-2020. Ces progrès sont essentiels, ici à Varsovie, pour créer une confiance et les fondations d’un accord ambitieux et effectif en 2015 à Paris.
Nous devrons y voir plus clair à la fin de ces deux semaines sur le processus et la chronologie des engagements sur la mitigation d’après 2020, ainsi que des engagements financiers indicatifs des pays développés. A cela doit s’ajouter un mécanisme clair de revue de ces engagements bien avant Paris. Cette revue doit évaluer à la fois si ces engagements sont collectivement à la hauteur pour l’objectif de limitation de la température, et individuellement justes face à des critères et indicateurs et critères d’équité.
Les Parties devront repartir de cette COP 19 avec la commande précise pour construire leurs engagements post-2020 dès 2014. Ils doivent aussi étudier les réductions d’émissions encore manquantes d’ici à 2020, ce « Gigaton Gap » que le PNUE vient de remettre à jour la semaine dernière (the Emission Gap report, UNEP 2013). Faire ses devoirs, pour les Parties, signifie augmenter l’ambition des engagements existants, intensifier le déploiement mondial des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique, sortir d’urgence des HFCs et autres efforts.
ECO espère que nos hôtes de la COP vont faire avancer le mouvement et resteront concentrés, malgré le temps passé à recevoir l’Association Mondiale du Charbon. ECO voudrait ici rappeler au Gouvernement de la Pologne que devenir un acteur de la scène internationale va de pair avec des responsabilités accrues. L’économie mondiale penche déjà vers les énergies fossiles, et ce sommet charbonnier en rajoute une couche très mal venue. C’est même faire bien peu de cas des pays qui risquent d’être anéantis par le réchauffement.
Pour résumer, et au delà de notre étonnement vis-à-vis du comportement de nos hôtes, ECO espère que ce nouveau processus simplifié et aminci va permettre de changer de regard sur l’engagement des parties. Celles-ci doivent remonter les manches, laisser de côté les slogans et éternels couplets des sessions précédentes, et faire des progrès substantiels sur la finance, les pertes et dommages, l’ambition pré-2020. Ils doivent déblayer le chemin pour conclure un accord ambitieux et juste, que le monde réclame pour Paris.